Les Fondamentaux de la Voile

" Ce qui compte, ce n'est pas tant la bouée que l'on vise, que la route que l'on emprunte pour y parvenir "

Repérer – Établir une démarche

Le recueil et le traitement de l'information tient une part décisive dans l'activité du régatier.

Le recueil suppose la mise en place de stratégies, conscientes ou non, qui orientent la prise d'informations. Les connaissances acquises, les routines construites, vont amener les coureurs à discriminer la multitude des signaux qui s'offrent à eux, et à traiter ceux qui leur paraissent significatifs. Ils constitueront un cadre plus ou moins formel d'interprétations de la situation qu'ils vivent.

 

Les modalités de recueil sont variées, et si l'observation joue un rôle essentiel, la vue n'est pas le seul sens mobilisé. L'attention des régatiers se porte sur le bateau, la vague qu'ils rencontrent. Elle porte sur l'environnement proche, la risée qui arrive, les adversaires à proximité, ou la marque de parcours qui se profile. Elle porte sur l'environnement élargi, à l'échelle du parcours de régate ou plus loin encore pour saisir des informations sur le paysage, qui pèseront peut être sur les évènements à venir sur le plan d'eau.

 

Le cadre d'interprétation de la situation de navigation est le fruit d'une attention qui tour à tour s'élargit et se resserre, d'une sensation de pression sous les pieds tendus sur le liston, à l'alignement observé d'un groupe de bateaux sur un rond de régate au vent du sien.

 

Ce cadre se construira parfois bien avant la régate en cours, à partir des expériences vécues précédemment sur le même plan d'eau, pour s'actualiser à chaque instant de la régate, au plus près de ce que vivent les coureurs "ici et maintenant".

 

 

 

Dans ce chapitre nous envisagerons les différents types de repères accessibles aux régatiers, ainsi que les moyens de les saisir.
Nous verrons également comment déjouer la difficulté à interpréter des informations souvent discrètes et parfois trompeuses, et tenterons d'envisager le travail à réaliser aux différents moments de la régate.

ADONNANTE
Changement de direction du vent réel, perçu depuis un voilier en route, qui éloigne le vent apparent de l'axe longitudinal du bateau.

 

ALIGNEMENT
Se dit de l'évolution des lignes de gain au vent respectives d'un groupe de bateaux, qui augmente le gain parcours du bateau sous le vent.
» Voir le schéma explicatif Voir un schéma explicatif

 

"APPELS"
Brèves rotations du vent, de faible amplitude, qui présagent d'une variation plus durable et de plus grande amplitude dans la même direction.

 

BACKING
Mot anglais, existant aussi en français : vent qui "revient" (désuet). Rotation du vent, vers la gauche de l'axe du vent précédent.

 

BUTEE
Axe du vent le plus excentré, mesuré dans une période déterminée, de part et d'autre de l'axe du vent moyen.
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EMPILEMENT
Se dit de l'évolution des lignes de gain au vent respectives d'un groupe de bateaux, qui augmente le gain parcours du bateau au vent.
» Voir le schéma explicatif Voir un schéma explicatif

 

REFUS
Changement de direction du vent réel, perçu depuis un voilier en route, qui rapproche le vent apparent de l'axe longitudinal du bateau.

 

REFUS OU ADONNANTE "RELATIF"
Refus ou adonnante, qui ramène le vent du moment vers l'axe du vent moyen, sans le recouper.

 

VEERING
Mot anglais, existant aussi en français : vent qui "vire" (désuet). Rotation du vent, vers la droite de l'axe du vent précédent.

 

Introduction sur les rePÈres
Pour percevoir ou confirmer un même événement, différents types de repères sont exploitables par le régatier. Recueillis sur le bateau, sur la flotte ou sur l'environnement, ils renseignent sur la rotation de vent elle même, ou sur ses effets immédiats.

 

 

Sensations

Beaucoup d'informations à recueillir en navigation requièrent l'observation d'éléments, sur le bateau ou l'environnement plus ou moins proche.

 

Mais si l'équipage est tenté de se fier à ce qu'il voit, il ne faut pas négliger le rôle que peuvent tenir les sensations proprioceptives (tensions musculaires et angulations articulaires) et extéroceptives (sensations de pression du caisson par exemple ou du vent sur le visage…).

 

Objectiver ces sensations est intéressant pour le régatier comme pour son entraîneur, qui devra quant à lui prendre en compte la maturation progressive de ces qualités chez les équipages jeunes.

 

 

RepÈres sur le bateau

 

Différents types de compas
Lire le compas, déduire la route, le vent

 

La vocation première du compas est d'indiquer la route suivie par le bateau.

La position de l'équipier ne lui permet pas toujours d'aligner son œil avec l'alidade centrale du compas et l'avant du bateau.

Compenser le décalage entre l'œil de l'équipier et l'axe du bateau est possible en utilisant des alidades ou des roses décalées.

Reste à déduire, à partir de la route mesurée, le cap probable du vent réel.

Différents outils existent, qui permettent de faciliter la démarche de calcul et de déduction.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Deux rôles à bord
L'historien et le Journaliste

 

L'exploitation des informations recueillies à l'aide du compas, doit avoir une utilité immédiate, mais elle peut être capitalisée et réutilisée dans d'autres contextes et à d'autres occasions : lors de debriefings, d'échanges avec un météorologue, par exemple. Il est capital d'utiliser le cap du vent car c'est la seule information facile et pertinente à mémoriser d'un bord à l'autre, d'une course à l'autre voire d'une année à l'autre lorsque l'on revient sur le même site.

On peut donc identifier deux rôles à bord, celui de l'historien et celui du journaliste.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Utiliser les penons

 

 

Les penons permettent de visualiser la qualité de l'écoulement de l'air sur la partie de la voile où ils sont positionnés. Dans certaines conditions, ils peuvent également constituer des indices qui permettent de renseigner l'équipage sur les variations du vent réel ou apparent.

 

Utiliser la girouette

 

 

Nombreux sont les bateaux qui n'ont pas recours à la girouette pour observer la direction du vent apparent.Pourtant, il est des conditions dans lesquelles aucun autre repère simple n'est accessible pour mesurer l'évolution en direction d'un vent faible et capricieux... Dans ces conditions en particulier, la girouette s'avérera une aide précieuse, essentiellement sur les bords de portant.

 

RepÈres sur la flotte
L'empilement dans l'ado, l'alignement dans le refus

Observer ses adversaires est bien sûr une nécessité dans la construction et l'actualisation de son projet tactique, mais les mouvements de la flotte peuvent également renseigner sur l'évolution du vent sur une partie du plan d'eau.

 

 

RepÈres sur l'environnement

SAVOIR ETUDIER LE VENT : Repérer les oscillations du vent, quand il oscille, amène immanquablement à s'interroger sur la régularité et les raisons de ces oscillations ; les aspects quantitatifs (vent moyen, butées…) doivent être croisés avec les aspects qualitatifs (intensité, répartition…) pour compléter l'analyse des conditions du moment.

 

Réf / Document Marc BOUET " Naviguer au près " Copyright Octobre 2004

 

Savoir étudier le vent

 

J'étudie le vent et trés rapidement je décide :

- Mode vitesse si vent stable et pression constante sur le plan d'eau

- Mode vent d'autant plus que le vent est instable en direction et en force ou que sa répartition sur le plan d'eau n'est pas homogène.

Si le vent oscille, il faut rechercher :

- Un meilleur cap en tribord et en babord et déterminer l'amplitude des oscillations.

- En déterminer un vent moyen.

- Une correspondance éventuelle entre les renforcements ou les faiblissements et les bascules.

- Une fréquence d'oscillations.

Noter et organiser les priorités

 

> Noter des caps sur le bateau: ne faîtes pas confiance à votre mémoire

> Se créer des repères.

 

Objectif : savoir en permanence si je navigue sur le bord rapprochant

 

 

Réf / Document Marc BOUET " Mode vent / Mode vitesse " Copyright Octobre 2004

 

Définir chaque jour le mode adapté

 

Si vous arrivez sur la ligne de départ au signal d'attention, oubliez tout ceci et bonne chance ! Vous devez avoir (prendre) du temps pour préparer une régate :

1 - En étudiant la situation à terre avant de partir sur l'eau

2 - En étant parmi les 1ers sur l'eau

Éviter de convoyer vers la ligne: rechercher déjà le maximum d'infos. Sauf conditions locales, il n'est pas absolument indispensable de naviguer sur le parcours. Naviguer sous le vent du parcours peut être plus sûr pour ne pas rater le départ. Naviguer au moins 10 mn sur chaque bord au près.

 

Analyser le vent actuel

 

Moyen principal : naviguer au près en utilisant le compas.

Enregistrer les caps sur chaque bord: existence de caps Maxi et Mini, d'un cap moyen?

Etudier la force du vent: régulier ou risées. Y a-t-il une relation entre les variations de force et de direction?

Définir si possible un cap de vent moyen: classer si possible le vent dans un type reconnu

 

Objectif 1 : repérer les bons angles

 

Naviguer suffisamment longtemps pour partir avec de bons repères :

- Bon cap tribord et babord

- Mauvais cap tribord et babord

- En déduire une amplitude de variation

- Essayer de trouver une fréquence

- Essayer de trouver une association pression-rotation.

Objectif 2 : évaluer la pression

 

- Répartition du vent sur le plan d'eau

- Niveau de différence de pression entre risées et molles

- Déplacement des zones de pression

Objectif 3 : évaluer un % de priorité entre angle et pression

 

Ce pourcentage doit pouvoir évoluer en permanence :

- Si la situation change

- Si on se rapproche de terre par exemple.

- Si on se rapproche de MAV: dernière pression ou bascule définitive.

Au portant : la pression sera d'autant plus importante à prendre en compte, si le bateau est rapide et si le vent de base est faible.

 

 

REPERER LES MARQUES : Prendre des repères sur les conditions de navigation, en particulier les oscillations du vent sur le plan d'eau, ne doit pas faire oublier la nécessité à se repérer sur le parcours ! Le repérage des marques est la première nécessité en ce domaine, plus ou moins aisé suivant les situations...

 


PRENDRE DES REPERES – MESURER LES CAPS DU VENT : Chaque équipage, chaque support, chaque contexte, peuvent introduire des spécificités dans les modalités de prise des repères et d'informations sur le plan d'eau. Mais chaque équipage ou coureur doit se construire des routines et des systématiques qui lui permettent de se construire rapidement une image précise des conditions dans lesquelles il est amené à naviguer.

 

 

 

Proposition d'évolution du compas à Alidades

Quel que soit le compas utilisé, pouvoir déduire l'axe du vent paraît nécessaire, autant pour faciliter les échanges au sein de l'équipage ou avec l'entraîneur, que pour construire, affiner et capitaliser son étude des sites où l'on navigue et régate.

 

 

Répartition des rôles – prise de repères en double

La répartition des rôles dans la prise de repères s'impose, compte tenu de la multiplicité des informations à recueillir. L'équipier ou le barreur, de par leur position dans le bateau et les tâches qu'ils accomplissent, auront accès plus facilement à certains repères.

 

 

Visée du cadreSelon l'orientation du corps lors de la prise d'informations, les repères peuvent être modifiés de façon plus ou moins importante. Ce paramêtre n'est pas sans conséquence et demande une réelle attention de la part des athlètes.

 

VISER LE CADRE
Les dangers d'une position qui varie...

Position correcte : bassin et membres inférieurs verrouillés, l'équipier se tourne vers l'arrière.

     

Dans cette position, l'addition de l'angle de rotation de la tête avec l'angle de vision permet de voir apparaître en bordure du champ visuel les objets situés approximativement à 90° de l'axe du bateau. Cela, à condition que le bassin et les genoux soient verrouillés. En se retournant vers l'arrière du bateau, on peut déduire que quand la marque au vent apparaît dans le champ visuel, le bateau se trouve sur la layline.

Position aléatoire : bassin et/ou membres inférieurs non verrouillés, l'équipier se tourne vers l'avant : on peut difficilement stabiliser son angle de vision et se projeter par rapport aux laylines.

     

Dans cette position, on évalue la distance qui nous sépare de la bouée, on augmente les risques d'erreurs, sur l'évaluation de notre position par rapport aux laylines.

 

 

Avoir une systématique dans son positionnement, de façon à ne pas perturber la bonne marche du bateau mais surtout d'assimiler le bon angle pour avoir un cadre parfait.

 

Utilisation du compas en équipage

En équipage, prendre de l'information aux différents moments de la régate, et partager ces informations, suppose que l'on organise les temps de recueil et les temps de "bilan" sur l'évolution de la situation.

 

 

Repérer l'orientation d'une ligne de départ

Prendre des repères sur la ligne de départ est un exercice particulier, dans la mesure où on a la possibilité d'anticiper, en fonction d'évènements attendus, sur l'endroit où l'on se trouvera, et pas simplement réagir en prévision d'un événement, depuis l'endroit où l'on se trouve effectivement après le départ.

 

 

Par rapport à l'oscillation en cours :

 

Réf / Document Marc BOUET " Naviguer au près dans le vent oscillant " Copyright Octobre 2004

 

Partir dans un vent oscillant

- Être capable de percevoir les bascules jusqu’au départ.

- Être capable de modifier son départ en fonction d’une bascule très tardive (peu avant le départ), ce qui implique souvent une position d’attente centrée.

- Être capable de rester en tribord si vent à droite, de virer très vite si vent à gauche: être ou se mettre sur le bord rapprochant.

- Ne pas sacrifier l’avantage ligne au moment du départ, partir 1/3 favorable moment du départ.

 

La ligne de départ

 

Utiliser les repères à terre

Quand le parcours est mouillé proche d'une côte avec des reliefs facilement discernables, il est possible d'utiliser des repères à terre, pour évaluer sa position ou sa trajectoire, par rapport à une ligne de départ, une marque, ou lors d'une rotation de vent.

 

"Repère départ" : J'ai repéré une balise, dans l'alignement de la bouée de ligne de départ Je suis sous le vent de la ligne, je vois mon amer à gauche de la bouée Je suis au vent de la ligne, je vois mon amer à droite de la bouée.

 

 

 

"Repère à terre" : Sur un bord, l'amer que j'aperçois dans l'axe du bateau, si il reste identique, indique la direction que j'emprunte. Si un nouvel amer apparaît de façon stable dans l'axe du bateau et que le précédent amer apparaît plus au vent, ce peut être le signe d'un refus. Si le précédent amer disparaît sous le vent du bateau, ce peut être le signe d'une adonnante.

 

 

 

Refus : le vent tourne ou le vent faiblit ?

Quand le vent faiblit, le vent apparent se décale toujours, dans un premier temps, vers l'avant du bateau, pendant un temps plus ou moins long avant que la vitesse du bateau ne chute à son tour sous l'effet de la baisse d'intensité.
Ce "symptôme" est le même que lors d'un refus, et il faut croiser les repères, pour faire la part des choses entre une modification d'intensité, de direction, de rendement, ou les trois combinés !

 

 

Hiérarchiser les indices : Pression / Direction

Dans les cas où le vent oscille mais varie également en intensité, il importe de s'interroger sur l'importance relative de ces variations afin de les hiérarchiser et être ensuite en mesure de réaliser des choix de trajectoires quand la nécessité s'impose de privilégier l'un ou l'autre.

 

Réf / Document Marc BOUET " Naviguer au près dans le vent oscillant " Copyright Octobre 2004

 

Choix pression/bascule : Comment choisir entre une bascule et plus de pression ? Ce tableau est valable d'autant plus que :

- Au portant par rapport au près.

- Sur un bateau rapide par rapport à un bateau lent

Vent plus fort
Bascule
Vent faible
Priorité
Secondaire
Médium
= faire choix
= faire choix
Brise
Secondaire
Priorité

 

 

Chronologie du recueil des repères

Il ne faut pas confondre la cause et l'effet : le compas ne tourne que lorsque le barreur a tiré ou poussé la barre ! D'autres indicateurs interviennent dans des délais certes restreints, mais néanmoins selon une certaine chronologie. Ils permettent de baliser la survenue d'une modification du vent.

 

 

Penons et refus relatifs

Les penons permettent de visualiser la qualité de l'écoulement de l'air sur la partie de la voile où ils sont positionnés. Dans certaines conditions, ils peuvent également constituer des indices qui permettent de renseigner l'équipage sur les variations du vent réel ou apparent.

 

 

Utilisation du compas et variation du VMG

On a vu (fondamentaux de repérer) comment la lecture du compas permet de déduire la direction du vent à un instant donné par l'utilisation d'alidades décalées ou de roses décalées. Cette technique nécessite également d'intégrer le vmg du bateau, afin de prévoir la valeur de l'angle à déduire ou ajouter à la mesure du cap compas, pour affiner son évaluation du vent en cours de navigation.

 

 

Priorité pour les minimes en double

La compétition en voile impose une activité de recueil et d'analyse de nombreuses informations, de natures différentes, et dans un temps restreint.
Cette exigence ne dispense pas de prendre en compte les motivations et capacités des coureurs les plus jeunes, et de mener une réflexion sur les priorités dans la construction des compétences des coureurs dans ce domaine.

 

 

Travail avec bouée invisible

Que la bouée soit visible ou non, il est important de pouvoir évaluer sa position et sa progression sur l'axe du parcours, sans avoir à garder l'œil rivé dans la direction de la prochaine marque.

 

 

Réaliser la route la plus courte

On a toujours plus de facilité à expliquer ses choix après l'action, qu'à les justifier avant. Questionner les coureurs sur leurs intentions avant un bord présente deux avantages majeurs :

- Cela permet à l'entraîneur de mesurer plus précisément le décalage qui peut exister entre l'intention et la réalisation, et ainsi questionner le niveau de représentation mentale des coureurs

- Cela permet également d'objectiver les éléments qui peuvent à certains moments interférer avec les choix de trajectoires réalisés.

Il ne suffit pas de comprendre pour savoir faire, néanmoins ce travail constitue une base de discussion avec les coureurs, dans la perspective d'objectiver par la suite les choix de trajectoires, réalisées à l'entraînement ou en régate. Acquérir ces connaissances de manière ludique n'est pas une gageure !

 

 

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